Par : Venance KONAN / « Affaire de pluie et autres Il y a quelques années, à chaque saison des pluies, je m’ingéniais à republier une chronique que j’avais écrite en 1999.
- Écrit par Adama
- Publié dans Infos Ivoiriennes
Parce que chaque année, je constatais que je n’avais rien à y changer.
Je ne l’ai pas fait cette année pour ne pas ennuyer ceux qui l’ont déjà lue plusieurs fois. J’écrivais dans cette chronique que, tant que nous ne changerions pas de comportement, nous aurons toujours les mêmes effets, les mêmes conséquences. Tant que le climat ne sera pas totalement déréglé, il pleuvra régulièrement sur la ville d’Abidjan. Peut-être désormais plus à la même période, peut-être plus de la même quantité, mais en principe, il pleuvra pendant longtemps encore. Et tant que nous continuerons à construire des maisons dans des zones inondables, dans des zones où des terrains sont susceptibles de glisser en temps de pluie, tant que nous nous ingénierons à laisser trainer nos ordures et nos sachets plastiques partout, nous connaîtrons des drames. Chaque année les services météorologiques nous préviennent. Les autorités prennent les devants en déguerpissant des zones à risque. Mais rien n’y fait. Chaque année l’on déplore des morts, des voitures emportées, des maisons détruites.
Parce que dès que la pluie s’arrêtera, nous reprendrons nos mauvaises habitudes. Nous oublierons de curer nos caniveaux, de déboucher nos égouts, et ceux qui habitent les zones à risque qui n’auront pas été déguerpis ne verront pas de raison d’aller vivre ailleurs. Et lorsque la saison des pluies reviendra, les mêmes vidéos de rue et maisons inondées, de voitures emportées circuleront à nouveau. Au point qu’on ne saura plus si elles ne datent pas de plusieurs années. Nous savons tout cela. Nous savons que les inondations et les morts en temps de pluie ne sont pas une fatalité. Nous savons ce qu’il faut faire pour que ces drames ne se produisent pas. Mais nous attendons que Dieu vienne régler ces problèmes à notre place. C’est plus simple pour nous. Ceux qui auront perdu la vie et leurs biens ? Bien entendu, ce sera Dieu qui l’aura voulu. Que pouvons-nous contre la volonté divine ? Rien.
Donc passons à autre chose.
J’ai vu sur internet que des surveillants qui avaient empêché la tricherie pendant les examens du BEPC de cetteannée auraient été séquestrés par des parents d’élèves dans une localité de l’ouest de notre pays. Je ne sais si l’information est vraie. Mais connaissant l’état de déliquescence morale de certains pans de notre société, cela ne saurait m’étonner. Je me souviens que lorsque j’étais étudiant à la faculté de droit de l’université d’Abidjan, entre 1978 et 1982, un de nos camarades fut surpris en train de tricher. Il fut sanctionné et cette information fut affichée dans toute la faculté. Jusqu’à ce jour, lorsque nous parlons de lui à un ancien de la fac, lorsque cette personne ne se souvient plus de lui, on précise « celui qui avait triché. »
A cette époque la tricherie était quelque chose d’infamant. Et aucun parent ne souhaitait qu’une telle honte frappe sa famille. Aujourd’hui ? Quel parent n’est pas prêt à débourser des sommes très importantes pour que son rejeton soit admis à tel ou tel examen ou concours ? Dans certaines régions, des gens se cotisent afin d’« acheter » un poste pour un fils du village. Cela dure depuis des années. Et je suis certain que bon nombre de personnes qui liront ces lignes se reconnaîtront parmi ceux qui ont triché pour avoir leur position. Aujourd’hui tricher n’est plus infamant.
Que peuvent des parents tricheurs inculquer comme valeur à leurs enfants ?
Ils ne comprendront pas que des personnes empêchent leurs enfants de tricher. Devrions-nous dès lors nous étonner que nos villes soient si sales, que chaque année la pluie sème la désolation parmi nous ? Nous avons beaucoup de tricheurs parmi nous. Et les tricheurs ne peuvent que mal faire le travail que l’on leur confie. Travaillons à les extirper, si nous voulons que notre société avance vers le progrès.
Par Venance Konan
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